Tunnel de Lave à La Réunion
En vacances sur l’île de la Réunion, je sors le casque et la frontale (oui oui, j’ai toujours ça dans ma valise) pour aller visiter les tunnels de lave. Aucun risque de brûler/fondre/s’asphyxier dans les vapeurs toxiques : la lave est solidifiée depuis plusieurs années.
Direction à l’Est de l’île, le côté où se déversent les coulées de lave, depuis le Piton de la fournaise jusqu’à l’océan. La route passe devant Notre-Dame des Laves, une église contre laquelle une coulée de lave s’est miraculeusement arrêtée.
Sur les flancs de la colline, on distingue les coulées, qui mesurent plusieurs centaines de mètres de large. Nous arrêtons la voiture au niveau de la coulée de l’année 2004, et nous poursuivons à pieds.
Les premiers pas sur la lave sont une découverte : ça croustille par endroit, à la manière d’un morceau de charbon qu’on écrase. Ensuite les formes et les couleurs sont étonnantes, on dirait un énorme gâteau au chocolat qui aurait trop cuit car il est tout noir et fissuré. Il y a même les endroits où il a coulé.
Quelques plantes commencent à coloniser le terrain : beaucoup de lichens et quelques arbrisseaux, qui prennent racines dans les fissures. Pour continuer la comparaison, on dirait que les fissures sont des trous de couteaux, plantés dans le gâteau pour vérifier s’il était bien cuit.
On double un groupe de touristes emmenés par un guide, et on trouve l’entrée rapidement. C’est un trou de deux mètres de diamètre qui accède à un tunnel peu profond (entre 2 et 5 mètres sous la surface) et dans lequel on tient debout la plupart du temps.
Le groupe avec le guide nous dépasse pendant que j’allume la radio étanche/antichoc pour se mettre en mode clubbing, nous entrons donc à sa suite. Dès l’entrée, c’est le dépaysement total, même pour des spéléos aguerris : il y fait vraiment obscur malgré nos lampes frontales puissantes car la lave est très très sombre. On distingue bien la forme de tobogan qu’a laissée la lave en se retirant.
Mais en fait, c’est quoi ces tunnels ? Lorsque la coulée de lave refroidit, elle durcit en surface, mais la lave en fusion (liquide quoi !) continue de circuler sous la surface, en formant des canalisations. Une fois que la lave arrête de s’écouler du volcan, elle se vide de la canalisation et laisse derrière elle un tunnel pour notre plus grand bonheur.
Au plafond de ces tunnels, la chaleur extrême a fait refondre la roche et a formé des mini-stalactites très arrondies.
On avance, souvent debout, parfois accroupis, dans le tunnel qui remonte en pente douce puisqu’on remonte la coulée. Deux avantages à choisir ce sens de progression : avancer à 4 pattes c’est beaucoup plus agréable en montant car ça tire moins sur les bras, et puis on se dirige vers la source du courant d’air. Comme c’est le courant d’air qui nous indique le chemin lorsqu’il y a des croisements, c’est plus simple à sentir si ça souffle sur le visage, plutôt que derrière la tête.
On passe devant la « concrétion » en forme de dodo, et on remarque aussi des trous cylindriques et profonds dans la paroi. Ce sont des arbres très denses qui ont été emporté par la coulée de lave, et qui se sont consumés doucement à l’intérieur.
Lors des passages bas, je regrette de ne pas avoir amené de genouillères : la lave est très édentée/coupante/abrasive. Bref, j’essaie de ne pas poser les genoux et je suis bien content d’avoir des gants solides pour poser les mains au sol.
On dépasse le groupe de touristes, dans lequel deux des nôtres se greffent par erreur. On fera demi-tour 5 minutes plus tard pour les retrouver complètement perdus, ayant déjà commencé à rebrousser chemin.
Il fait très chaud là-dessous, et l’effort fait transpirer abondamment lors des passages bas. On continue la progression, en croisant un autre groupe de visiteurs venant dans l’autre sens, qui ont eu l’air bien surpris en entendant la musique sous terre.
Je fais quelques photos, mais au prix de nombreux efforts car même en mode nuit, les clichés sont très sombres. En plus, en m’asseyant sur des rochers pour prendre la pose, j’ai déchiré mon bermuda : quand je vous disais que la lave était coupante, c’était pas des bêtises !
On approche de la fin, le premier puits de lumière apparait. C’est magnifique, mais un peu inquiétant. On est devant la preuve que le tunnel s’effondre. On continue, en s’approchant de plus en plus de la surface : les longues racines des plantes pendouillent dans la galerie. Encore un puits de lumière, et la sortie est au troisième puits, que l’on peut escalader facilement.
Ce parcours souterrain nous a pris deux heures sans se presser, et il nous reste la coulée de lave à redescendre à pied. C’est une marche insolite mais compliquée, car bien souvent le sol ressemble à un amalgame de croquettes énormes, complètement instable sous les pieds. On cherche alors les zones les plus sombres, constituée par des coulées bien solides, pour rejoindre le parking sans encombre.
Superbe ! je n’avais vu que la lave encore tiède au-dessus là-bas, mais c’est encore plus beau au-dessous…
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C’est super. Comment peut-on accéder à l’entrée de cette grotte? Y a-t-il un risque de se perdre qui justifierait de faire appel à un guide?
Merci beaucoup
Bonjour,
Pour accéder à cette grotte, il me semble que c’est un parking sur la deuxieme coulée de lave qu’on franchit en prenant la route vers cette zone.
Ensuite, il faut soit connaitre parfaitement l’endroit (un trou dans le sol au milieu de la coulée de lave, en contrebas de la route), soit repérer un groupe qui rentre avec un guide.
Je dirai que c’est extrèmement compliqué de trouver l’endroit par soi-même.
L’appel au guide est utile pour : l’accès, les explications, le matériel (genouillère, lampe, casque).
Un risque de se perdre ? Pas vraiment non. Au pire, vous ferez demi-tour.
Bonjour,
Si vous recherchez un guide, nous sommes une équipe de moniteurs diplômés d’état spéléologie passionnés par le volcanisme. Vous découvrirez tous nos parcours en suivant ce lien vers notre site Envergure Réunion : https://www.canyon-speleo.re/tunnel-de-lave-la-reunion/. Nous proposons des visites de tunnel de lave dans la parte basse de la coulée 2004 très bien décrite dans cet article. Mais également une traversée sportive toujours dans ce même tunnel pour découvrir les parties très peu fréquentées de ce tunnel et une sortie plus spéléo dans le tunnel du bassin bleu à L’Éperon dans l’ouest de l’île. Le tunnel du bassin Bleu a été formé par les éruptions du Piton des neige, il est beaucoup plus ancien que 2004. La visite du tunnel du bassin bleu est plus sportive que la découverte coulée 2004 : escalade, passage bas et vastes salles au programme.